jeudi 29 avril 2010

Héros de guerre

Le sport, son discours et sa popularité ont remplacé dans la culture populaire l'espace qu'occupait jadis la guerre entre les peuples.   De nombreux indices le montrent, à commencer par l'emprunt de termes au vocabulaire de guerre : “bombardement”, “blitz”, “offensive”, “défensive”, “fourbir les armes” et ainsi de suite, sont autant d'exemples (cela pourrait faire l'objet d'un billet entier, mais ce n'est pas ici le propos) de ce transfert de paradigme.   Ainsi, les athlètes ont remplacé dans  l'imaginaire collectif la place qui a par le passé été allouée aux héros de guerre ( le surnom Alexandre le Grand en est un subblime exemple).  C'est ainsi qu'on se créé des héros, des sauveurs.  Mais qu'on escamote au passage de nombreux éléments d'une juste analyse.  Enter Jaroslav Halak.

Il y a un mélange de deux éléments qui entre en jeu dans la consécration de Jaroslav Halak à laquelle on assiste ces derniers jours - sur les tribunes populaires (blogues, lignes ouvertes), mais aussi, à un degré moindre, dans les médias, chez les “experts”.  D'abord, il y a cette volonté, ce désir d'avoir des héros à admirer et auxquels s'identifier (voire dans lesquels se projeter).  Ensuite, il y a tout ceux qui ont, pour toutes sortes de raisons, ont une compréhension et une vision limitée du jeu qu'est le hockey et qui, par conséquent, ne peuvent que ramener le résultat d'un match à la seule performance du joueur le plus en vue, sans être capable d'analyser plus loin (il y a aussi, chez une minorité crasse, cette volonté enfantine de dire “j'avais raison d'être Pro-ci ou Anti-ça”, mais ceux-là ne méritent même pas qu'on s'y attarde) : ceux-là seront peut-être intéressés par ce qui suit.  Lisez attentivement, parce qu'il y aura des questions plus tard !

On va danser le papillon

Le style papillon est pour plusieurs une simple formule passe-partout pour paraître connaisseur.  Dans les faits, c'est une façon de garder les buts qui s'appuie sur un principe fondamental : être positionné de manière à la rondelle frappe le gardien sans qu'il ait à faire de geste particulier.  Autrement dit, un gardien papillon qui exécute le style à la perfection ne sera jamais spectaculaire : il sera devant la rondelle et elle frappera son plastron ou ses jambières.  Il faudra un tir parfait (lire : “par-dessus les épaules”) pour le battre.  

Comment battre ce style ?

Même si le papillon est le style le plus répandu dans la LNH, il se marque beacoup de buts dans la ligue.  Quid ?

Et bien, il existe des moyens de battre le papillon. 

    • Faire bouger latéralement le gardien : de cette manière si le jeu est exécuté rapidement, le gardien n'a pas la chance de se repositionner adéquatement, et offre à ses adversaires des espaces pour tirer. 
    • Provoquer le premier geste : soit par une feinte, ou alors avec un tir qui force le gardien à s'agenouiller, et à offrir un retour. 
    • Prendre le centre de la glace : plus les tirs proviennent de la périphérie, plus il devient facile pour le gardien. Il faut donc réussir à attaquer le filet de front.
    • Finalement, un gardien n'ayant pas la maîtrise de son style pourra être mal positionné et devra compter sur ses réflexes.


Or, et c'est ici qu'on vérifie que vous avez bien suivi, que remarque-t-on ?  Allons !  Un petit effort de réflexion ! 

Bon, d'accord, on vous le donne en mille : l'excellence d'un gardien en papillon est tributaire du jeu de ses coéquipiers devant lui.  Durant cette série, et la chose est devenue d'autant plus vraie que la série avançait, les joueurs de Canadien ont excellé dans deux aspects cruciaux permettant de contrer les moyens cités plus haut.  D'abord, ils ont protégé la ligne centrale de leur zone défensive (l'axe) forçant le Washington a jouer (et tirer) de la périphérie.  Ensuite, ils ont réduit presque à néant les tentatives de passes transversales, évitant ainsi à leur gardien se voir prendre hors-position suite à un déplacement latéral précipité. 

Deux inséparables

Bien sûr, le jeu des joueurs et la performance du gardien vont de paire. 

C'est bien beau de réduire les chances de marquer et confiner l'adversaire à des tirs en périphérie, si le jeu du gardien n'est pas au point ou encore les tirs (même de périphérie) sont parfaits, les résultats ni seront pas.  C'est ce qu'on a vu lors du deuxième match de la série, après lequel, d'ailleurs, la mauvaise performance du gardien avait été relevée.  

Parallèlement,  si le jeu du gardien est à point, mais qu'on laisse l'adversaire tirer de trop près, qu'on échappe les retours ou qu'on laisse l'adversaire déplacer la rondelle d'un côté à l'autre de la zone défensive, il y a fort à parier qu'une équipe qui compte sur des francs-tireurs de la trempe d'Ovechkin finira par marquer sa part de buts.  Ce à quoi on a assisté lors des matchs 4 et 5. 

Par contre, lorsque tout tombe en place, alors il est permis de croire à l'impossible.  Ce à quoi nous avons assisté lors des trois derniers matchs : une défensive (un système de jeu) qui réduit presque à néant les menaces adverses et un gardien toujours en place pour bloquer ce que son équipe concède en fait de tirs. 

S'il fallait absolument ériger une statue aux héros de guerre montréalais en ce printemps qui s'étire,  il faudrait penser à faire une place sur le piédestal à la brigade défensive du Montréal, qui est toute aussi responsable du résultat surprenant de cette série que le cerbère derrière elle.  Et à Kirk Muller, le cerveau derrière le jeu en désavantage numérique.   Et à Jacques Martin, le chef d'orchestre (vous savez, l'homme qui n'a jamais rien gagné en séries et qui s'est fait littéralement « outcoacher » par Bruce Boudreau).


Nous n'avons pas pu confirmer au moment de mettre sous presse, mais des sources bien informées ont rapporté que tard hier soir, aux abords du Centre Bell, on pouvait entendre rire Bob Gainey.

vendredi 23 avril 2010

À quand la retraite ?

Bizarrement, nous ne sommes pas trop étonnés, ce matin, de la réaction du ministère des Transports au projet de réfection de l'échangeur Turcot. 

Projet rafraichissant, pour ne pas dire avant-gardiste, s'il en est un : une sorte de paire de ronds-points géants, superposés, répondant de manière beaucoup plus concrète aux exigences du BAPE que le projet présenté par le ministère (dont on attend une révision dans les prochains jours, voire les prochaines semaines). Le projet présenté par le maire Tremblay réserve une large place au transport collectif, dénature moins le portrait urbain, vise à réduire la circulation automobile plutôt que l'encourager et réduit largement la délocalisation des résidents des quartiers avoisinants.

Rappelons, pour la gouverne des lecteurs, que devant la désuétude de l'échangeur qui tombe littéralement en pièces (on doit installer des grillages sous les structures aériennes pour éviter que des blocs de bétons ne s'en détachent et s'écrasent sur les voitures qui passent dessous), le ministère avait proposé un projet qui, à peu de choses près, reprenait la structure et les tracés actuels, et les redessinait au sol. Un projet digne des années 60, orienté vers le transport automobile avant tout, et qui en plus de se traduire par des expropriations multiples, dévisagerait le paysage urbain et scinderait ou isolerait des quartiers entiers. Renvoyer à sa table à dessin par le BAPE, le ministère serait sur le point de proposer sa « refonte », à laquelle la proposition de Montréal était une alternative proposée.

Alors, pourquoi ce refus ? « Trop cher, trop long », disent la ministre Boulet et ses sbires, hauts fonctionnaires des Transports du Québec. En fait, le coût passerait de 2,5 à 6 milliards, et la date de « livraison », de 2017 à 2022. Une évaluation tellement ahurissante qu'on la croirait surréaliste, justifiant un refus catégorique selon la ministre. Pourtant, quand vient le temps d'allonger les deniers publics pour emplir les goussets de ses amis de la construction, le gouvernement libéral ne se fait généralement pas prier.

La Ville et ses alliés - un rare consensus s'est installé derrière le projet - ont peine à croire leurs oreilles devant de tels chiffres. Elle attend d'avoir le détail de ces évaluations. « D'ici quelques jours », s'est fait répondre M. Tremblay. En attendant, le maire est revenu à la charge, accompagné d'alliés momentanés du monde municipal, et enjoint le premier ministre Charest de se mettre le nez dans le dossier. Celui-là doit commencer à maudire l'année 2010, qui est à peine entamée et lui apporte déjà un lot de soucis.

Le premier ministre bougera-t-il ? Laissez-nous en douter. Habitué, par trop d'années au pouvoir ,à forcer dans la gorge des électeurs les décisions de son gouvernement, il va probablement faire preuve de son entêtement légendaire = surtout que, les structures appartenant au MTQ, il demeure seul maître à bord. Ce projet deviendra-t-il un boulet de plus aux pieds du parti libéral qui les accumulent sans coup férir ? Sans doute. Mais les gens oublient vite, et les élections sont si loin ! Sans compter qu'ils sont 290 000 à utiliser quotidiennement cet échangeur, 290 000 qui préfèrent de loin le confort de leur automobile à la promiscuité du transport collectif et qui, n'habitant pas la ville-centre n'ont pas grand chose à cirer de la qualité de vie qu'on y trouve. Sont-ils autant à être affecté par le projet digne du pliocène présenté par les génies vieillissant du MTQ ? C'est sûrement le premier calcul qu'aura fait la ministre, bien avant celui des coûts ou des délais !

Au fait, quand prendront-ils leur retraite, ces génies vieillissant ?

Dans le iPad (parce qu'un calepin, c'est tellement out)

Rien de tel, pour terminer une soirée, que se caler devant l'Attaque à 5 pour une bonne rigolade.  Il y a longtemps qu'on a cesser de se questionner sur les raisons qui poussent les directeurs de sports des différents réseaux de télé et radio, à avoir des normes de qualité du français aussi basses.  En fait, on se demande même s'il ont quelque chose qui ressemble à une exigeance à cet égard.
Malgré tout, on se doit de souligner la performance particulièrement médiocre de M. Marc Bureau : on veut bien que le monsieur n'est pas un as de la syntaxe, mais y aurait-il moyen de offrir un petit cours de prononciation ?
En particulier :
  • « fallait» ne se prononce pas « fôllait».
  • « Des fois » ne se prononce pas « dîns fois »
  • « Montréal » n'est pas « Montrial »
Si jamais vous le croisez, faites-lui le message de notre part.
tecnorati code : 9KWTYD76WWUH

jeudi 15 avril 2010

On s'entend pour dire

Le printemps à Montréal est synonyme de deux choses (l’une moins certaine que l’autre) : d’abord, il faut se porter une attention particulière à l’endroit où on pose le pied, car la fonte des neiges est accompagnée d’un dégel du crottin de chien.

Un peu moins certaine, mais quand même assez régulière (quoique souvent brève) : la présence de Canadien en séries d’après-saison ; le détail comme on disait autrefois.

Et donc, la présentation, dans la petite boîte noire, un soir sur deux, du proverbial “
hockey des séries
”. Vous verrez, dès la fin du premier match, les experts (et les connaisseurs auto-proclamés) seront unanimes : “Ah ! Du vrai hockey des séries”… sans pour autant être capables de définir précisément ce qu’ils entendent par là. D’ailleurs, on serait bien curieux de les voir passer un test au sourd là-dessus.
Quoi ? Vous ne savez pas ce qu’est un test au sourd ? Vous connaissez certainement le test à l’aveugle : on vous bande les yeux, et on vous met au défi de discerner le goût du Pepsi, du Coke, du Coke Diète et du RC Cola, sans voir la bouteille.

Et bien, le test au sourd est identique, sauf qu’il n’est pas pareil : on vous bouche les oreilles (ou on coupe le son, c’est selon) et on vous montre côte-à-côte 4 matchs de hockey, deux des séries et deux de saison régulière, et on vous met au défi de discerner les premiers des deuxièmes. On soupçonne fortement que la plupart des experts et / ou connaisseurs auto-proclamés échoueraient le test. L’humain est ainsi fait : il est si efficace pour se convaincre de quelque chose qu’il finit par y croire même si ça n’a rien à voir avec la réalité. Vous avez sûrement déjà vu ces prêcheurs américains qui “guérissent” d’une bonne poussée sur le front ? Les gens s’évanouissent tant ils sont convaincus que ça marche. Le hockey des séries est un peu comme ça : les experts vous jureront que c’est authentique. Ils ne s’évanouiront pas, par contre.

Ainsi donc, du hockey des séries : les mêmes joueurs, les mêmes règles, les mêmes arbitres, les mêmes patinoires, les mêmes rondelles. Mais un jeu com-plè-te-ment différent. Vous entendrez donc un paquet de clichés, au cours des prochaines semaines, qui soulèvent autant de questions. Nous n’avons pas toutes les réponses, alors ne vous gênez pas pour utiliser la zone “commentaires” ci-bas pour nous apporter vos lumières.

- Pourquoi les seules mises au jeu en zone adverse qui sont très importantes sont celles qui ont lieu à la fin de la période ? A-t-on plus de chances de marquer en fin de période ?

- Pourquoi d’ailleurs, les buts en fin de période sont censément plus importants, alors pourtant que l’adversaire aura tout le loisir de s’en remettre pendant l’entracte ? Et si ce serait le fait que l’attente tue, pourquoi alors des entraîneurs demandent-ils des temps d’arrêt après certains buts cruciaux, créant ainsi de l’attente ?

- Est-ce que le premier but du match vaut vraiment plus que le dernier ? Et quand est-il d’un premier but du match en fin de période suite à une mise au jeu en zone adverse ? Doit-on parler de Grand Chelem ?

- Pourquoi dit-on sans cesse que Jacques Martin n’a jamais rien gagné ? Combien d’entraîneurs actuellement dans la ligue nationale ont remporté les grands honneurs ? Combien ont atteint la finale ?
Combien ont atteint la demi-finale ? Nous soupçonnons (nous avons de nombreux soupçons aujourd’hui) que bien des entraîneurs aimeraient avoir la feuille de route de M. Martin.

- Où peut-on faire nos prédictions sur le nombre d’experts qui se seront gourrés dans leurs prédictions ? On vous rappelle que ce sont les mêmes experts qui avaient prédit de belles choses pour Maple Leafs et Hurricanes, de la misère pour Colorado qui nous éclairent aujourd’hui de leur savantes lumières. (Demain, nous vous ferons part de nos prédictions, construites selon la méthode éprouvée du “nom dans le chapeau”. On va bien s’amuser)

- Tant qu’à faire des prédictions, pourquoi personne ne s’est aventuré à prédire le nombre de joueurs qui seront utilisés dans la série Montréal-Washington ? Nous disons un seul : le Canadien n’aura pas à habiller Halak, son aura devrait suffire à intimider le Washington et motiver les joueurs du Montréal.

- On entend beaucoup dire que le Washington a une défensive poreuse. Pourtant, elle n’accordé que 10 buts de plus que Canadien, en 82 matchs. Est-ce dire que Canadien aura un net avantage d’un but si la série se joue en 8 matchs ?

Vous pourrez réfléchir à tout cela en sirotant une petite Molson dans votre salon.

Voici d’autres questions auxquelles vous pouvez répondre par la même occasion :

- Lu ici sur le Grand Club : “le % d’arrêts de Halak est de ,924. Celui de Price, 0,912. C’est la différence entre un gardien d’élite et un gardien ordinaire.” Question : À quel seuil un gardien ordinaire devient-il un gardien d’élite ? 0,914 ? 0,917 ?, 0,920 ? Nous avons eu beau fouiller dans les registres de stats et sur nhl.com, nous n’avons pas pu obtenir la réponse. Si vous savez, laissez ça ci-bas.

- Le Anaheim est exclus du détail. Serait-ce l’effet du cancer-gros-ego-poison-du-vestiaire-faiseur-de-cliques-qui-parle-même-pas-français Koivu ?

- Où se procure-t-on les boules de cristal qui permettent de voir comment et où seront les gardiens du Montréal dans deux ans ?

- Comment se fait-il que les membres du Grand Club qui sont les plus prompts à critiquer l’éthique de travail de Canadien et à blâmer Jacques Martin lorsqu’il donne congé à ses troupier, sont ceux-là mêmes qui passent tellement de temps sur ce site qu’il est clair qu’ils ne travaillent pas eux-mêmes ? Ont-ils l’autorité morale de juger de l’effort d’autrui ?


On s’entend pour dire…
Tournure de phrase très tendance, on la voit et l’entend de plus en plus, tant chez les blogueurs que dans la communauté médiatique : au moment de poser une prémisse douteuse (et souvent sans fondement) à une théorie fumeuse, l’intervenant utilise la formule “On s’entend pour dire”, assurant ainsi l’unanimité autour de l’idée. Par exemple : "On s’entend pour dire que Canadien a une bien meilleure défensive que Capitals et que c’est ça qui te fait gagner en séries… ". Cette formule a pour but de permettre à son émetteur de traiter en paria quiconque ne serait pas d’accord avec l’affirmation. Question : Peut-on s’entendre pour dire que “on s’entend pour dire” est une expression à proscrire ?


La face de bois
C’était lors de la retransmission du match Canadien-Lightning, le 9 mars dernier. Désirant exprimer le manque d’entrain au banc du Tampa Bay, Joël Bouchard souligne que tout le monde y a “la face de bois”. Sorte de croisement entre “la gueule de bois”, “le visage de marbre” et “la face d’enterrement”, l’expression a eu le mérite de faire sourire bon nombre de québecois. Mais pas tous. Benoît Brunet, lui, s’est plutôt dit "Que voilà une belle expression ! " Ainsi, quand, quelques minutes plus tard, le Tampa Bay encaissait un but moins d’une minute après avoir marqué pour s’approcher de Canadien au pointage, M. Brunet remarquait qu’ “On comprend pourquoi l’entraîneur a la face de bois”. Question : quand deux pareilles sommités de la langue françaises l’utilisent coup sur coup, peut-on parler d’expression consacrée ?


Rire dans sa barbe des séries
Canadien participe pour une cinquième fois au cours des six années sous la direction de Bob Gainey. Seules 7 autres équipes en ont fait autant ou mieux au cours de ces 6 années. On s’entend pour dire que c’est pas pire pantoute.